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Composer avec la chimio – Deuxième partie – Cuisiner, un geste d’amour

By mai 27, 2013No Comments

J’ai toujours eu une passion pour la nourriture. Quand j’étais enfant, si mes parents allaient au restaurant, je leur demandais de me décrire en détail tous les délicieux mets qu’ils avaient dégustés, de l’entrée au dessert.

par Alyssa Burkus Rolf

J’ai toujours eu une passion pour la nourriture. Quand j’étais enfant, si mes parents allaient au restaurant, je leur demandais de me décrire en détail tous les délicieux mets qu’ils avaient dégustés, de l’entrée au dessert. La nourriture est une récompense, un réconfort, une joie et ma façon préférée d’entretenir des rapports avec mes amis et ma famille.

Mais durant ma chimio, tout a changé. Manger est devenu pour moi un énorme combat, et ce qui était auparavant une source de réconfort avait en grande partie disparu. La plupart des aliments avait un goût et une texture horribles, et j’étais constamment aux prises avec la nausée. Au moment où j’avais tellement besoin d’être dorlotée, mes aliments réconfort ne faisaient plus effet, ce qui était très frustrant. Le ginger ale goûtait le métal, les pâtes crémeuses étaient bannies, et j’avais du mal à trouver des aliments dont le goût n’avait pas changé. Je devais boire d’énormes quantités d’eau pour nettoyer mes reins de tous les médicaments, ce qui était difficile à cause des nausées. Les aliments et les repas étaient devenus un défi constant, et je n’avais plus assez d’énergie pour trouver de nouvelles solutions.

Apporter de la nourriture aux personnes en difficulté est une coutume qui est souvent l’un des moyens les plus faciles d’exprimer son amour et de témoigner du soutien en période difficile. J’ai eu la chance d’être entourée de personnes aimantes qui faisaient des pieds et des mains pour nous préparer des repas. Un groupe d’amis avait établi un calendrier grâce auquel, chaque semaine, ils nous apportaient tour à tour un repas fait maison. Six semaines plus tard, mon cerveau embrouillé par la chimio a enfin réalisé que ce n’était pas juste une coïncidence. Une voisine faisait un plat en cocotte dont nous raffolions, et nous recevions souvent des soupes et des mets qui étaient un régal. Nos « plats cuisinés avec amour », livrés comme prévu ou parfois de manière imprévue, étaient un enchantement durant cette période sombre. Nous sortions rarement pour souper de peur que je sois malade ou trop fatiguée pour en profiter. Mais la livraison de ces repas à la maison nous rappelait que, même si notre vie sociale en avait pris un coup, nos amis étaient loin de nous avoir oubliés.

Durant mes traitements, malgré ma grande faiblesse physique, il n’était pas question que je cesse de faire l’épicerie. Comme j’éprouvais de vives douleurs aux mains et aux pieds, j’avais de la difficulté à pousser le chariot, et cela me prenait trois fois plus de temps que d’habitude pour faire le tour du magasin, mais c’était une tâche à laquelle je tenais mordicus. À bien y penser, mon entêtement peut sembler un peu stupide, mais à l’époque, c’était l’une des rares choses « normales » que je pouvais faire et qui me permettait de contribuer aux repas.

Dans les années qui ont suivi mon traitement, ma relation avec la nourriture a beaucoup changé, et j’ai vécu une série de hauts et de bas. J’ai sollicité les conseils de nutritionnistes et de naturopathes, et j’ai expérimenté quelque temps la macrobiotique, l’un des régimes alimentaires les plus restrictifs qu’il m’est arrivé d’essayer. Les contacts sociaux ou les repas au restaurant étaient devenus difficiles parce qu’il y avait si peu de choses que je pouvais manger (si vous ne connaissez pas les principes de base de la macrobiotique, imaginez un régime composé de riz, de fèves et de tofu, et pas grand-chose d’autre). J’ai fini par comprendre que survivre au cancer n’en valait pas la peine si je ne pouvais pas profiter de la vie. Durant mes grossesses, je suis tombée dans l’excès contraire en franchissant les limites de la saine alimentation pour assouvir ma faim de crème glacée et de frites. Avec le temps, j’ai fait demi-tour pour reprendre un régime réaliste, plus facile à gérer et, en général, relativement sain.

Je réalise aujourd’hui que, durant les années qui ont suivi mon traitement, la nourriture a été ma façon de tenter d’exercer une certaine forme de contrôle sur ma maladie. Je me disais qu’en découvrant une combinaison magique de légumes verts et de vitamines, je parviendrais peut-être à une rémission à long terme. Entre mes traitements, je pouvais au moins avoir l’impression de faire quelque chose pour éloigner la maladie.

Je parlais récemment avec Anwar Knight, présentateur de la météo à CTV News et membre du conseil d’administration de Lymphome Canada. Il a terminé son traitement de la maladie de Hodgkin, il y a moins d’un an. Aujourd’hui, il continue d’éliminer de son régime alimentaire certains aliments, surtout le sucre blanc et la farine blanche (lire son blogue au http://anwar.ctv.ca). Sa détermination m’a rappelé l’importance de la nourriture devenue une arme dans mon incessante bataille contre la maladie.

J’ai atteint un point qui me convient, où presque tout ce que je mange est sain (plus de farine blanche, de sucre blanc ni de nourriture transformée) et où j’ai ajouté une grande quantité de légumes et de légumes à feuilles consommés sous différentes formes. J’ai recommencé à faire des jus (un retour à ma phase macrobiotique) et, plusieurs fois par semaine, je prépare des boissons fouettées (smoothies) avec de délicieux jus de légumes vert foncé. Les jours où je n’ai pas le temps, j’ajoute des poudres vertes à nos smoothies, ou même quelques poignées de bette, que je pulvérise en minuscules particules en les mettant à la toute dernière étape dans mon mélangeur. Je consacre environ 10 % de mon régime aux plaisirs de la table, où un verre de vin avec des amis est parfaitement acceptable, et un carré au chocolat avec les enfants, un délice divin.

J’ai finalement réalisé que la nourriture saine n’est pas uniquement un cadeau destiné aux personnes en difficulté – c’est aussi un geste d’amour envers soi-même. Notre choix d’aliments influe profondément sur notre bien-être physique, mental et émotionnel, et prendre le temps de planifier des repas sains est une activité qui doit occuper une place importante dans la journée. Se soigner au meilleur de ses capacités avec des aliments sains, des exercices réguliers et une bonne hygiène de sommeil devrait faire partie intégrante du quotidien.

J’ai consacré beaucoup de temps à apprendre quels étaient les meilleurs aliments pour ma santé, et je ne suis pas encore sûre d’avoir trouvé la bonne combinaison. Mais lorsque je mange sainement, je me sens merveilleusement bien et j’ai de l’énergie à revendre durant toute la journée. Si j’ajoute de la citrouille ou du germe de blé dans mes biscuits ou si je prépare un smoothie vert foncé pour les membres de ma famille, ces aliments sont pour eux un geste d’amour, un amour qui, j’espère, fera toujours partie de l’héritage que j’entends leur léguer.

Cuisiner est un geste d’amour – faites circuler ce message!

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